…
Au flanc de la colline, une femme attend l'aurore.
Elle est là, dans la prairie, parmi les fleurs où perle la rosée de l'Aube.
C'est l'instant où chaque être vivant dans la nature suspend son souffle ; il écoute dans le silence au creux de lui-même résonner le sublime Son divin, avant d'entonner l'hymne de joie de la Création exultante dans l'embrasement du Soleil levant.
Elle est là, ses cheveux de nuit déployés en gerbes d'étoiles jusqu'à terre, ses jambes repliées sous sa robe d'améthyste, ses mains ouvertes sur ses genoux, elle se laisse fondre dans la lumière qui l'immerge… Elle entend chacune de ses cellules chanter la mélodie des rythmes du monde ; immobile, elle danse à l'infini sur la vague de Vie du jour naissant, et son cœur bat le tambour de la Terre inondée de Soleil.
Elle est Joie pure dans la Vie Une.
Tandis qu'elle s'abandonne à l'extase de la danse des rayons d'or, soudain, elle voit devant ses yeux une énorme bouche d'Ombre où se mêle toute la Douleur du monde ; et cette Douleur l'appelle de toutes ses forces, l'attire dans l'horreur de sa substance.
Elle voit rouler les charniers de milliards d'animaux hurlant la stupeur et l'effroi des tortures de l'homme ; elle voit toute la nature réduite en esclavage, estropiée, transloquée par l'œuvre de l'homme ; elle entend le terrible fracas des arbres tombant sur le sol désolé ; elle entre dans les profondes plaies de la terre saccagée… Elle ressent l'épouvantable angoisse de l'homme arraché à lui-même, et les cris des petits de l'homme, éclatés en milliard de larmes de sang, percent son cœur d'une atroce douleur.
Et quatre cavaliers blancs s'engouffrent au galop dans l'Ombre, brandissant leur épée nue de leur main droite, serrant dans leur main gauche les graines de conscience de la Vie ; ils disparaissent dans l'immonde Ténèbre hurlante.
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Elle, reste là, revêtue de rose et d'améthyste, lumière dans la Lumière du Monde.
Elle ne sait que rester là, dans la Lumière du matin vivant, témoin de la conscience de l'Un.
Immobile, elle danse sur la vague de Vie du jour naissant, et son cœur bat le tambour de la Terre inondée de Soleil… Et pourtant, en même temps, son âme éprouve une infinie tristesse. Elle implore :
Un oiseau bleu à la gorge rouge, s'est posé sur son épaule gauche. Il répond à l'oreille de son cœur :
« Ishtar, Lumière du Jour, Étoile du Matin, Eau de perle pure dans son écrin de saphir, oui tu as un Pouvoir : celui de faire tomber la pluie. »
« Faire tomber la pluie ? Et comment le pourrais-je ? », s'étonne Ishtar.
« Regarde », dit l'oiseau bleu.
Elle voit s'ouvrir devant ses yeux un nouveau champ de lumière, à l'endroit même où elle ne voyait que l'Ombre monstrueuse.
Elle entre dans ce champ, guidée par des voix harmonieuses. Émerveillée elle découvre que les graines de conscience de la Vie sont arrivé à maturité dans le cœur des hommes ; elle entend les hommes parler à l'Esprit Invisible au cœur de toute chose, elle entend l'Esprit répondre aux hommes dans les sols, les plantes, et les bêtes.
Partout où elle dirige ses pas, l'éleveur connaît chaque vache, chaque brebis, chaque jument, et leurs petits par leur nom ; partout l'agriculteur consulte avec respect les sols et les plantes sur la récolte prochaine. Le lion et l'antilope paissent ensemble la Force de Vie dans l'herbe pulpeuse ; le serpent et l'oiseau reposent ensemble au creux de l'arbre. Elle participe de l'accomplissement de chaque être vivant dans l'amour de Dieu, et une joie intense monte en elle, comme un torrent de Vie tumultueux.
Elle s'avance encore, et voit les cactus sans épine émettre leur bonheur dans un parfum suave, et le désert fleurir en un parterre de roses embaumées.
Elle entre dans la Ville Sainte, bâtie sur les rives du fleuve d'Eau Vive brillant comme du cristal, où s'abreuvent en parfaite harmonie les sols, les plantes, les bêtes et les hommes.
Elle voit en pleine gloire la perfection de la Vie divine s'épanouissant en chaque chose sur la terre…
Et son cœur éclate de Joie pure ; dans un ravissement d'Amour elle étreint tout l'or rose de la Vie qui palpite autour d'elle… et le fleuve de joie irrésistiblement monte en elle, il jaillit dans l'arabesque de son bras droit levé vers le Soleil, et se déploie dans l'Arc en ciel aux sept couleurs ; et les spirales de lumière de ses cinq doigts d'or s'irisent de myriades de gouttes de pluie qui se déversent sur la terre ; une pluie tiède comme une larme d'Amour, une pluie d'une infinie douceur.
Bientôt, de la terre abreuvée, s'élèvent des colonnes de brume transparente. ; bientôt transparaissent les perles de rosée dans l'herbe verte, resplendissant sur la Terre neuve. Sous les yeux d'Ishtar s'entrouvrent des milliards de fleurs roses et blanches libérant leurs suaves parfums.
Elle est là, dans l'éclatante lumière de l'Aurore, émerveillée, contemplant la parfaite Beauté du Monde. De son cœur s'élève une note de cristal qui se déploie dans l'univers, célébrant la Gloire de Dieu dans le Matin Neuf.
Elaine, le 06/12/94.
« As-tu jamais donné ordre au matin,
fait connaître à l'aurore sa place,
pour qu'elle empoigne les franges du monde
et qu'elle secoue les méchants ».
(Job 38, 12-15)
Cf. :
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